L'hiver avait été long, le soleil était haut dans le ciel et la vue de foule qui se pressait aux 4 marchés de Toulouse ne laissait pas préfigurer un quelconque orage. Nous étions sortis ce matin-là dans le but de visiter le grand salon du jeu qui avait lieu au parc des expositions de Toulouse. En fait, j'aurais dû me préparer, les cartes météo de la veille annonçaient un risque d'orages modérés dans l'après-midi. La veille, j'avais vu cette animation satellite où on voyait remonter une colonne d'air humide depuis l'Ariège jusqu'à Montauban. Cette colonne d'air semblait bloquée et formait un entonnoir dont la pointe Sud se rapprochait de la ville rose. Voici l'animation de la veille. On voit déjà un système en V se former sur le Sud-Ouest :
C'est sans trop de méfiance que je me dirige avec mes amis vers le parc des expositions de Toulouse sur mon vélo. Il est 14h. Sarkozy est aussi au parc aujourd'hui pour sa pseudo-campagne (rarement vu autant de monde là-bas!!)
18h, nous sortons du salon, un cumulus rond et sombre (rare d'en voir de pareils sous nos latitudes) gonfle au dessus de Toulouse, le temps est lourd, sans vent, et les yeux sont levés vers le ciels. Mais à ce moment rien ne permet de prévoir la tornade. Il fait chaud et le mölkky est jetté:) nous décidons de préparer un pic-nique sous le pont Neuf de Toulouse.
J'enfourche mon vélo et me dirige chez moi pour récupérer quelque chose à manger. Arrivé chez-moi en centre ville, le tonnerre se met à gronder au loin, et m**de! Je ne peux plus changer mes plans maintenant. Le ciel est vraiment noir au dessus de Toulouse. Le temps de battre le record absolu de la douche la plus rapide, de prendre mon sac à dos, un saucisson et un couteau, la caméra (on ne sait jamais) et l'appareil photo, et hop, je prends la route du pont Neuf. En descendant les allées Jean Jaurès, des gouttes de pluie grosses comme des œufs commencent à marteler le sol, c'est bien le moment ! Le saucission va prendre l'eau ! Mais je devine que c'est une averse temporaire, alors je continue jusqu'au pont... Arrivé là-bas pas le temps de descendre rejoindre les autres, la forme au dessus des arbres m'est étrangement familière, on distingue un entonnoir gris qui descend du nuage...
J'ai eu le coup de speed de l'année! J'ai jeté le vélo, sorti le saucisson et la caméra pour ne pas rater l'événement, clic, clac, une photo, une vidéo, un zoom; et le sentiment d'assister à La chose du siècle. Pour moi pas de doute, c'est bien une tornade.
Je suis loin de la tornade, peut-être 6 km ou plus. Sa forme descend des nuages pour se perdre derrière les arbres au Sud, en direction de la cité du Mirail. A ce moment je n'ai encore aucune idée du lieu exact. Ce qui m'a marqué c'est le mec tout affolé, vélo à terre et caméra à la main sur le pont Neuf, zoomant entre les passants qui ne réagissaient pas! Ça a duré quelques minutes, le temps de poser mon petit trépied sur le muret et de placer la caméra en mode "time lapse", et de ne plus y toucher, au risque de gâcher peut-être La vidéo du siècle.
Le tourbillon continue, le téléphone sonne. Je réponds, détaché, il y avait une tornade... je me souviendrai toute ma vie de l'indifférence des passants qui se promenaient sur les berges de la Garonne! Ca peut sembler bête comme spectacle, mais quand on attend ça toute sa vie sans plus y croire, ça change tout ! On n'y croit plus, on ne s'y attend pas, ce n'était pas prévu, on l'espérait quelque part au fond de nous mais le deuil était fait... et pourtant. La vidéo de la tornade a fait pas mal de vues sur youtube, et même si j'aurais pu être au pied de la tornade ce jour là, je suis content d'avoir pris ma caméra.